Plus qu’une simple solitude, l’isolement s’est immiscé dans le quotidien de notre Québec, y creusant une brèche humaine dont l’ampleur nous concerne tous. Notre population avance en âge, c’est une réalité tangible : d’ici 2030, une personne sur quatre aura soufflé ses 65 bougies. Dans ce paysage démographique, une vague sourde, celle de l’isolement social des personnes aînées, menace de tout emporter sur son passage si nous restons les bras croisés.

Loin d’être une série de faits divers, il s’agit d’une véritable question de santé publique, aux répercussions souvent douloureuses et tenaces. Cette situation nous convoque. Elle nous invite à poser un regard lucide sur ces vies souvent confinées au silence, à saisir, chiffres à l’appui, ce que signifie vieillir dans la déconnexion, et surtout, à chercher ensemble comment retisser des liens durables. Contrer cet oubli est une conviction profonde qui guide nombre d’actions quotidiennes.

La solitude en chiffres : un constat qui ébranle, une mobilisation qui s’impose

Les études brossent un portrait préoccupant de l’isolement des personnes aînées au Québec. Il ne s’agit pas de cas isolés ; des milliers de nos concitoyennes et concitoyens plus âgés expérimentent une coupure sociale dont l’étendue alarme :

Un péril grandissant : Les démographes estiment que, d’ici 2030, plus de 30 % des 2,3 millions de Québécoises et Québécois de 65 ans et plus pourraient se trouver en situation d’isolement (Petits Frères, 2023).

Le poids de la solitude : En 2022, 14 % des Québécoises et Québécois âgés de 65 ans et plus se sentaient « toujours ou souvent » seuls, un chiffre qui grimpe à 17 % pour les 75 ans et plus. S’ajoutent à ce constat les 26 % des 65 ans et plus qui se sentaient « parfois » seuls (Institut de la statistique du Québec, 2022).

L’écho du silence familial : Pour ceux et celles qui vivent seuls, l’absence de contacts familiaux réguliers peut être particulièrement pesante. Une enquête de la Chaire de recherche sur le vieillissement de l’UQAM (2019), s’appuyant sur des données antérieures et des entretiens, indiquait que 31 % des personnes aînées vivant seules ne bénéficiaient pas d’un contact familial hebdomadaire. Plus récemment, une étude de l’UQAR (2023) en milieu rural a corroboré que 35 % des personnes aînées isolées dans ces communautés n’avaient pas de contacts familiaux suivis (Journal Le Soir, 2023).

Ces statistiques, aussi éclairantes soient-elles, ne disent pas tout des existences marquées par le manque, l’absence, une détresse souvent invisible. Elles doivent cependant nous servir d’électrochoc pour catalyser l’action et la bienveillance.

Un lourd tribut : quand l’isolement mine la santé

L’isolement n’est pas qu’une blessure de l’âme ; il s’attaque insidieusement à la santé physique et mentale des personnes aînées, compromettant leur bien-être et leur droit de vieillir dans la dignité.

L’esprit qui vacille (la menace cognitive) : Le lien est établi et interpelle : l’isolement social accroît sensiblement le risque de développer une démence. Des études de référence font état d’une majoration de ce risque pouvant atteindre 50 % à 60 % (données issues de rapports comme celui du Conseil national des aînés, 2014). Une stimulation neuronale appauvrie en précipite la dégradation.

Le fardeau psychologique (dépression et anxiété) : L’isolement agit comme un terreau fertile pour les troubles de santé mentale. Il peut déclencher ou aggraver la dépression et l’anxiété. En milieu rural québécois, durant la pandémie, une étude de l’UQAR a mis en lumière que l’isolement social subjectif était associé à une détresse psychologique 2,4 fois plus élevée chez les hommes et 1,9 fois plus chez les femmes (Journal Le Soir, 2023).

 Le cœur à rude épreuve (risques cardiovasculaires) : L’isolement augmente les risques d’hypertension et de maladies cardiovasculaires. Certaines données suggèrent un accroissement du risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) de 32 % chez les personnes socialement isolées (résultat souvent cité par des organismes de santé, par exemple, l’American Heart Association, via Radio-Canada, 2024).

 L’issue fatale (une mortalité précoce) : L’accumulation de ces maux pèse lourd sur l’espérance de vie. Des experts vont jusqu’à comparer les effets de l’isolement social sur la mortalité à ceux de fumer 15 cigarettes par jour (Dre S. Dupuis-Blanchard, citée par Radio-Canada, 2024).

Le risque de décès s’accroît de façon prononcée.

Derrière les chiffres, des vies : l’urgence d’une solidarité active

Au-delà des pourcentages, il y a une grand-mère, un grand-père, un voisin, qui attend un appel qui ne vient pas, qui n’a personne à qui confier ses appréhensions. Une existence qui, peu à peu, perd de sa couleur et de sa dignité. L’absence d’une amitié, d’une oreille attentive, c’est l’absence d’une main tendue, d’une aide ponctuelle, d’un partage qui fait vivre.

Certaines personnes sont plus exposées : les « très âgées » (75 ans et plus), celles qui vivent seules, celles qui traversent des difficultés financières ou dont la santé se dégrade. Les freins à la connexion sociale sont multiples : deuils, problèmes de santé, mobilité réduite, mais aussi parfois la méconnaissance des ressources disponibles, l’inaccessibilité des lieux d’activité, ou encore cet âgisme rampant qui dévalorise et freine l’épanouissement social des personnes aînées.

Un appel à se mobiliser : briser l’isolement, tisser la solidarité

Le constat est clair : l’isolement social des personnes aînées au Québec est une épreuve humaine et sanitaire profonde. Elle risque de s’intensifier avec le vieillissement de notre population si nous restons spectateurs. Les conséquences sont lourdes, de la détresse psychologique à une fin de vie prématurée, écourtant des existences qui méritaient d’être vécues avec chaleur et respect.

Ne considérons plus l’isolement comme une fatalité sociale ; c’est un défi de santé publique qui nous appelle à l’action, mais aussi une formidable occasion de renforcer nos communautés. Passons d’une logique de réaction à une culture de prévention active et attentionnée. Tendre la main à une personne aînée, c’est reconnaître sa valeur, son histoire, son humanité. Investir pour réduire l’isolement social, c’est investir dans la qualité de vie, le respect des droits et la santé des personnes aînées. 

Un appel à se mobiliser : briser l’isolement, tisser la solidarité

Chaque geste compte, chaque voix porte. Voici comment agir :

Multiplier les gestes du quotidien : ces attentions simples qui maintiennent le contact avec les aîné·es de notre entourage.

Revendiquer et soutenir des politiques publiques visionnaires qui favorisent une réelle inclusion sociale des personnes aînées.

Découvrir les actions entreprises par Mission inclusion et ses partenaires pour améliorer concrètement le mieux-être des personnes aînées au Québec

Faire un don pour soutenir ces initiatives qui transforment des vies chaque jour. 

Et vous, quelles initiatives vous inspirent pour briser l’isolement des personnes aînées dans votre communauté ?

De quelles manières pouvons-nous, ensemble, renforcer ce précieux tissu social qui entoure les personnes aînées ?

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