De retour de mission au Burkina Faso, notre gestionnaire des programmes en Afrique Charles Mugiraneza nous raconte comment il a vécu l’attentat à l’ambassade de France à Ouagadougou, et nous explique le contexte autour de cette attaque.

C’était un vendredi sombre à Ouagadougou. Le vendredi 2 mars 2018 entre désormais dans l’imaginaire collectif des Burkinabés.

On avait pourtant eu droit à un matin tranquille d’un vendredi de prière pour les musulmans et de carêmes pour les chrétiens. Tout le monde vaquait tranquillement à ses occupations. Les Ouagalais se taquinaient comme c’est dans leurs habitudes. Notre producteur expert Alain massé avait pris la route deux heures plutôt vers le lieu de sa mission : Dédougou. Geneviève Lalumière et Pierre Olivier Brassard avaient passé déjà leur première nuit respectivement à Ziniaré et Kaya.

Tout a brutalement basculé aux environs de 10 h du matin. Encore une fois, Ouagadougou est frappée, mais cette fois-ci au centre névralgique de sa force de défense et de l’ambassade de France avec tout ce que cela veut dire.

La question sur les lèvres de tous les Ouagalais, pourquoi encore NOUS?

Aucun doute : ce sont bien des djihadistes qui ont attaqué l’ambassade de France à Ouagadougou et l’État général du Burkina Faso. Le samedi tard dans la nuit, mon épouse Chantal, avant mon vol de retour m’a appelé pour me dire que le double attentat venait d’être revendiqué par le Groupe pour le soutien à l’Islam et aux musulmans, qui est une sorte d’alliance entre diverses organisations terroristes qui ont tellement été mises à mal ces derniers temps par les opérations militaires de la force conjointe du G5 et de l’armée française dans le Sahel, qu’elles ne sont plus capables d’agir seules.

Pour mieux comprendre

Il y a un an à peu près (du moins pour ceux qui suivent la région d’Afrique de l’Ouest), nous avons vu s’opérer un rapprochement de ce qu’il restait des mouvements comme Al-Qaïda au Maghreb islamique, al-Mourabitoune, Ansar Dine ou le Front Macina. Tout cela sous la houlette d’un vieux chef touareg, Iyad ag Ghali, islamisé de longue date et qui se cache en Algérie d’où il envoie des petits commandos poser des mines sur les routes qu’empruntent les convois militaires ou mener des opérations suicides dans les capitales africaines. Avec pour objectif de créer autant de chaos que possible, de montrer qu’ils ont toujours un réel pouvoir de nuisance et qu’ils n’entendent pas déposer les armes, quels que soient les coups qu’ils reçoivent.

Comment ils expliquent les deux attaques simultanées de Ouagadougou

Une grosse opération menée à l’aube le 14 février dernier dans l’oued Inaghalawass, à 900 mètres seulement de la frontière algérienne où les terroristes se croyaient à l’abri, trois de leurs campements dans lesquels se trouvaient 23 djihadistes ont été frappés, neutralisés dont six hauts responsables, tous membres du premier cercle de décision.

Parmi eux, on dit qu’il y avait le chef des cellules terroristes qui avait organisé les deux attentats de 2016 contre un hôtel à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire et contre celui du restaurant Cappuccino à Ouagadougou. On se souvient que notre collègue Louise Dyotte était à Ouagadougou au moment de cet événement. C’est donc un coup extrêmement dur qui a été porté au Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans. Et c’est ce qui expliquerait pourquoi il a finalement décidé de sacrifier huit de ses membres de plus en lançant l’attaque à l’ambassade de France, ambassade archisécurisée et l’état-major général du Burkina Faso.

L’attaque contre l’état-major burkinabé semble avoir été un peu mieux organisée.

À l’évidence, il avait été mieux planifié et peut être depuis plus longtemps et surtout, il était plus facile de s’en approcher discrètement, les assaillants s’étant procuré des uniformes, dit-on, dans un magasin de fournitures militaire, ce qui leur a permis d’arriver jusqu’à la porte arrière du bâtiment au volant d’une voiture piégée bourrée d’explosifs.

Il faut aussi noter qu’au Burkina Faso, l’appareil de sécurité et de renseignement n’est pas au mieux de sa forme puisqu’ils ont été pratiquement décapités en 2014 avec le renversement de la dictature. Beaucoup de militaires et les principaux responsables des services ont été écartés avec le départ de l’ancien président Blaise Comparé. Malheureusement, on ne rebâtit pas des réseaux efficaces en à peine trois ans.

Une lueur d’espoir

Les Burkinabés sont unis comme un seul homme face à l’adversité. La communauté régionale est plus que sensibilisée, rapprochée et solidaire, les visites des chefs d’État régionaux en témoignent. La communauté internationale a dépêchée des émissaires pour témoigner de sa sympathie. L’heure doit être à la solidarité.

Nous, L’ŒUVRE LÉGER, comme organisation témoignons de notre SOLIDARITÉ et devons continuer par notre partenariat avec la population à travers nos partenaires.

Pour en savoir plus sur nos actions actuelles au Burkina Faso, visitez la section Sécurité alimentaire de notre site Web.